Youwarou : confidence amère d’une victime de conflit

Article : Youwarou : confidence amère d’une victime de conflit
Crédit: Sarah / Iwaria
28 juillet 2021

Youwarou : confidence amère d’une victime de conflit

Dans ce récit fictionnel, je prête ma plume à Wouri Boly, une veuve de 32 ans vivant dans un village situé dans le Cercle de Youwarou, région de Mopti. Cette femme a vu sa vie se transformer en cauchemar le jour où des terroristes déguisés en masques Dogons ont attaqué leur village.

De retour de la brousse avec un tas de fagots, je suis venue trouver que les habitants, paniqués, déguerpissaient comme des voleurs. Motif : une attaque terroriste contre le village, parce que nous refusons que les femmes se voilent, que la charia s’applique et que le mariage des filles mineures se fasse.

De manière répétée, des coups de feu aux quatre côtés du village. Ainsi, affolée, je me suis précipitée à arranger quelques affaires pour m’enfuir aussi avec ma fille de 12 ans.

Hélas !

Le village était déjà encerclé par ces bandits. Ils nous ont réunis et ramenés dans un camp que nous ne connaissions pas. Pour ce qui concerne ma petite fille et les autres enfants mineures, elles ont été contraintes de céder à leur demande, à savoir des agressions sexuelles sous nos yeux. Impuissante, j’enrageais. Certaines ont eu des jambes paralysées suite à ces agressions et d’autres ont été sévèrement blessées, dues aux coups reçus. Mère que je suis, j’ai été blessée dans mon âme face à ces violences sexuelles, et sans pouvoir défendre ma petite si innocente qui vient d’avoir à peine ses premiers règles. Et concernant les adultes, nous étions leurs esclaves, leur obéissant à contre volonté.

Une liberté sans grande importance

Quelques mois après, j’ai été libéré par l’un des chefs rebelles. Et depuis ce jour-là, je me suis séparée de ma fille.

Ainsi, commença mon calvaire. Après des kilomètres de marche, mon corps criait de soif et de faim. J’ai pu trouver un abri pour y passer la nuit dans un petit village qui venait d’être incendié. Le lendemain m’a conduit dans une autre aventure.

Après je ne sais combien d’heures de marche, j’étais dans un état désespéré, quand je suis tombée sur un groupe de chasseurs qui m’ont amené dans un camp de déplacés. Ce site est abrité par deux ethnies dont des Peuls et des Dogons. Depuis que je suis arrivée sur ce site, les conditions de vie ont été difficiles. Je n’ai pas accès aux aliments distribués, juste parce que c’est insuffisant par rapport aux nombre de déplacés. L’eau qui est source de vie est imbuvable et en plus, il n’y a pas d’électricité ni d’infirmier pour s’occuper des gens qui sont dans le besoin. Là-bas, il n’y a pas assez de logement. Quatre à cinq personnes par tente. Et s’il pleut encore, on reste sur pied.

J’ai fait cinq mois dans ce camp avant de rejoindre un autre camp à Bamako (Niamana). Là-bas, ma vie a pris une autre tournure encore plus grave. J’espérais au soulagement, ce sont plutôt des difficultés qui mon accueillis.

Après 150 jours sur ce site, les conditions insuffisantes de vie ont commencé à me fatiguer. Moustiquaires, pénurie d’eau, insuffisance de nourriture et j’en passe. La population nous vient en aide. Je n’ai que deux pagnes sur moi.

Quand il pleut, tout le monde s’inquiètent parce que la pluie pénètre les tentes qui ne sont même pas en bon état. Nous souffrons tous de malnutrition, les enfants étant les plus touchés. Nous n’avons pas accès au service socio-sanitaire de base.

Le gouvernement nous a promis de venir à notre rescousse, mais jusque-là, aucun résultats favorable. Je ne peux même pas dormir la nuit, pensant que ma petite fille est entre les mains de ses extrémistes sans cœur. Mon souhait le plus ardent était de la retrouver avant mon dernier souffle. A quoi bon continuer à survivre sans elle. Malgré ma grande peine, tout ce que je demande est qu’Allah fasse que la paix durable revienne et que chacun des déplacés et refugiés retournent chez eux dans la quiétude.  Et que nos enfants reprennent le chemin de l’école. 

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Commentaires

Abdoulaye Arama
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Du courage ma soeur le monde est une histoire fait ton histoire un evenement

Fatoumata Z. Coulibaly
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inchallah Frère. Merci bien